Une journée au Festival de l'Arpenteur

Une journée au Festival de l'Arpenteur à écouter la forêt, les sons de la prison, des artistes et le jazz des oiseaux.

Cet été j'ai eu le plaisir de me rendre dans plusieurs festivals de la région. A commencer par le festival de l'Arpenteur, dans le Massif de Belledonne. Au bout d'un chemin, après les résidences qui l'hiver accueillent les skieurs randonneurs (si ce loisir est encore praticable), le Bivouac d'où part mon premier parcours (en réalité j'ai loupé trop optimiste celui de 10h avec l'historien Raphaël Lachello sur les évolutions milénaires et actuelles de la forêt).

Un premier Parcours Audio Sensible, conçu par Gilles Malatray - Desartsonnants (artiste que j'ai connu ici, sur LinkedIn) qui guide notre petit groupe de public-randonneurs sur un sentier forestier à pas très très très lent. Sans commentaire, en essayant de s'extraire des bruits du groupe, notre attention se porte sur les sons du vent, des arbres, le ruisseau au loin, un avion parfois, peu d'oiseaux. Gilles nous prête quelques instruments de sa conception pour écouter les frottements sur la mousse, l'eau qui s'écoule. Entendons-nous vraiment la sève des arbres ? Et les mains également, un moyen simple et formidable pour modifier les sons que captent nos oreilles. Ces instruments et la lenteur de nos mouvements mettent nos corps en (dis)position active pour percevoir notre environnement.

Un peu plus loin, après le ruisseau, nous percevons des sons bien différents qui se chevauchent : des voix, des bruits métalliques, des claquements, des pas, une musique accélérée. De jeunes détenus sont avec nous, ils ont participé à un atelier mené par Gilles et pour cette journée exceptionnelle "hors les murs" nous font écouter le résultat de leur travail. Le dehors si paisible reçoit les sons de l'intérieur d'une maison d'arrêt. La composition est une boucle sonore, diffusée simultanément et en décalages à différents points de la clairière où nous sommes arrivés. La personnalité et l'enthousiasme de ces jeunes détenus, la confrontation des environnements sonores, suscitent beaucoup d'intérêt et conduisent à un échange très vivant, là en forêt, sur leur situation, leur vie quotidienne, les sons que nous entendons, comment ils ont travaillé avec Gilles… C'était très inattendu, un peu comme si ce parcours (très court!) nous avait conduit à écouter non seulement la forêt où nous étions mais également cet environnement particulier et si étrange d'une maison d'arrêt.


© Nicolas Bertrand